Les représentations du monde

« Toutes les choses qui naissent et se développent par elles-mêmes sans l'assistance d'hommes ou de dieux et par conséquent sont immortelles. » H. Arendt, Le concept d'histoire

• Elle n'est causée que par elle-même.

• Elle n'est pas produite de l'extérieur.

Naturel s'oppose à artificiel (« Qui est dû à l'art, qui est fabriqué, fait de toutes pièces; qui imite la nature, qui se substitue à elle; qui n'est pas naturel. » TLF)

Quand l'outil est fabriqué, utilisé et entretenu par quelqu'un, l'être naturel effectue toutes ces tâches par lui-même.

• la Nature s'épuise : des espèces disparaissent, évoluent...

• L'homme cultive la terre, les fruits et les légumes ne poussent pas d'eux-mêmes.

• Les choses n'apparaissaient pas ainsi à l'époque (Darwin...)

• Nous n'avons pas inventé les plantes, il fallait qu'elles existent pour que nous les cultivions.

Il est l'éternel reproduction du même.

L'ensemble de la Nature se meut selon un ordre cyclique :

l'espèce en se renouvelant ne meure jamais, elle est un éternel recommencement

Les individus disparaissent pour laisser la place à d'autres individus qui réalisent ce que leurs aînés ont déjà réalisé.

L'être à jamais ne peut sombrer dans l'oubli.

Les animaux n'ont pas besoin d'histoire car les générations se suivent et sont toujours ce qu'elles sont.

Les abeilles d'aujourd'hui vivent précisément comme elles vivaient il y a dix siècles.

L'abeille reste ce qu'elle est et le restera à jamais.

L'homme en tant qu'être naturel existe lui aussi à jamais.

L'homme n'était pas pensé comme un être en devenir (seul objet de l'histoire)

Il était doté d'une essence

Le devenir n'était qu'une corruption accidentelle de cette essence

Comment alors justifier l'apparition de l'histoire ?

Quelle est la spécificité humaine qui la rend possible et nécessaire ?

L'individu humain, dans la mesure où il est doté d'une conscience de son existence, possède une biographie, il existe comme devenir.

Naissance - développement - régression - mort.

Il se représente donc comme une ligne dotée d'un début et d'une fin au contraire du cycle naturel.

L'homme, par son action, contraint les éléments à s'adapter à sa trajectoire (modification des animaux, des plantes pour qu'ils produisent en fonction de ses besoins et non en fonction de la Nature qui suit invariablement le cycle des saisons)

« Chaque fois que les hommes poursuivent leurs buts, labourant la terre qui ne peine pas, contraignant le vent qui souffle librement à venir gonfler les voiles, fendant les vagues qui roulent sans cesse, ils coupent en travers d'un mouvement qui est sans but et tourne à l'intérieur de soi. » H. Arendt, Le concept d'histoire.

• « labourant la terre qui ne peine pas »

  le laboureur peine pour faire pousser les plantes, il se contraint

  la terre elle ne se fait pas violence pour porter ses fruits, elle se contente d'être ce qu'elle est.

  Comme respirer ne nous demande aucun effort.

• L'image de la mer et du navire

  le vent, les courant et les vagues vont sans but, ils existent et existeront sans cesse

  l'homme détourne ces forces vives pour les intégrer dans son mouvement rectiligne

  Le voyage ce n'est pas le vent qui n'a ni début ni fin. Le voyage c'est la destination. Nous allons d'un point à un autre quand le vent se contente de tourner sans fin.

Sophocle en qualifiant l'homme de terrifiant avance la même idée.

L'homme crée le chaos en imposant un autre rythme à la Nature qui sans lui resterait dans l'être-à-jamais dans lequel tout tourne autour de soi

• Objection : Les animaux existent également comme individu singulier.

• Réponse : Ils n'existent comme tel que pour nous

  La plante notamment n'existe pas comme personne, sauf la rose du Petit Prince

  De même les animaux existent avant tout comme représentant d'espèce, et nous en sommes conscients puisque nous cherchons à sauvegarder les espèces plutôt que les individus.

• La Nature tout entière est immortelle

• la valeur de l'individu humain se mesure à ses gestes et ses paroles, seules choses périssables.

Voilà l'élément qui va être à l'origine du concept d'histoire chez les Anciens.