Justification de l'histoire

S'extraire de la mortalité

Toutes les œuvres humaines sont marquées du sceau de sa mortalité

Action, outil, idée, etc. sont voués à disparaître avec le temps : elles naissent, croissent et périssent.

Pour sortir de cette fatalité et réintégrer le Cosmos (monde organisé) dans lequel tout demeure, il faut trouver le moyen de doter de permanence les faits humains, car plus ils perdurent plus ils ont d'existence.

La mémoire (et donc l'Histoire) vont dans ce sens.

Le rôle de l'historien est justement de conférer une certaine immortalité aux actions humaines par la mémoire et l'écrit.

L'acte singulier qui n'existe que dans son accomplissement devient histoire.

Il sort de l'agent pour devenir un objet dont chacun peut s'emparer et transmettre.

Le rôle du poète et du théâtre tels qu'ils étaient conçus prend ici tout son sens.

La part de l'histoire

Toutes les actions humaines ne sont pas à mettre sur le même plan.

L'immense majorité des actions sont les mêmes aujourd'hui qu'il y a dix siècles, seul le décors change.

Nous aimons, nous haïssons, avons des soucis, des joies... comme nos ancêtres.

Celles-ci appartiennent à l'espèce, à l'essence de l'homme, donc à la Nature et sont donc immortelles. Elles n'ont donc pas besoin de mémoire.

Les actions qui intéressent l'histoire ce sont celles qui sortent de l'ordinaire, celles qui font rupture avec l'ordre du monde, celles-ci doivent être sauvées de l'oubli.

Une histoire de l'individu

L'Histoire pour les Anciens ne consiste donc pas à montrer comment la vie des hommes s'intègre au mouvement de la nature

mais au contraire dans quelle mesure l'action humaine entre en rupture avec l'harmonie naturelle.

Elle est ce qui est proprement extra-ordinaire, qui rompt la régularité.

L'Histoire ne s'intéresse donc aux actions humaines que dans la mesure où elles ne sont pas la reproduction de la vie des individus qui les ont précédés.

Il s'agissait donc bien de l'histoire des actions individuelles et non pas l'histoire des peuples.

Impartialité

De fait les Grecs notamment ne cherchaient pas nécessairement à valoriser les actions de membres leur peuple mais également de leurs ennemis.

Il s'agit de conter les actions glorieuses et prodigieuses des Grecs comme des Barbares.

Ce n'est pas l'histoire du peuple Grecs mais la chronique des faits extraordinaires.

Cette traditions s'est perpétuée tout le long du Moyen-Age avec les ménestrels et autre troubadours qui chantaient les actions héroïques d'individus singuliers.

L'histoire contre-nature ?

  • oui, dans la mesure où l'action individuelle est ce qui brise le cycle par son caractère rectiligne.

  • non, puisque l'objectif est de faire réintégrer le fait humain au cosmos en le portant à une certaine immortalité.