La religion n'est-elle qu'un refuge pour l'ignorance humaine ?

Pour Comte c'est avant tout un besoin de rationalité qui va pousser les hommes à recourir au sacré.

Aux premiers âges de l'humanité, l'homme éprouvait sa condition comme celle d'une créature abandonnée dans un monde qui lui est opaque, dont il ne comprend pas le sens.

Nous avons vu dans le premier chapitre de notre cours consacré à la conscience que nous avions besoin de percevoir une régularité dans le monde pour agir et cette régularité passe nécessairement par une explication, un système de causes et d'effets permettant une récurrence.

Ainsi, l'homme ne peut se contenter de reconnaître passivement la présence de phénomènes sans leur trouver une explication quelle qu'elle soit afin de se déterminer par rapport à elles.

Et c'est la religion qui va lui donner un premier sens possible des phénomènes qu'il observe.

S'il voit la foudre frapper un arbre, l'explication la plus spontanée qu'il puisse donner de la chose, c'est que la foudre est un être vivant qui voulait frapper cet arbre, ce rocher.

Le fétichisme consiste donc à attribuer à un être naturel une vie intérieure, une volonté, une pensée, etc. sur le modèle de celle de l'homme, mais dont les manifestations sont plus puissantes, plus énergiques.

Lorsque la foudre frappe, je peux me rassurer en me disant qu'il s'agit d'un être supérieur à qui il suffit de faire quelques offrandes pour m'en concilier les bonnes grâces, éviter ainsi d'être foudroyé.

Nous voyons sans peine comment l'homme passe progressivement du fétichisme (pouvoir de l'objet) au polythéisme d'une part et au monothéisme enfin.

• Dans un premier temps l'explication la plus évidente reste que la volonté appartient au phénomène lui-même, c'est la foudre qui veut tomber où elle tombe pour des raisons qui lui sont propres.

• Mais cette explication pose problème car nous sommes alors entourés d'innombrables entités autonomes et il nous est impossibles de nous arrêter à chacune d'entre elles individuellement.

  Nous avons besoin d'unifier ces différents phénomènes sous une même volonté que nous pourrions nous concilier.

  Nous allons alors ranger les phénomènes par catégories plus générales et pour chacune de ces catégories nous considérerons qu'elle agissent sous une même volonté ; c'est le polythéisme.

• Ce principe de généralisation poussé à son terme conduit nécessairement au monothéisme.

  Si je rentre dans les bonnes grâces de cette seule volonté alors je me protège de l'ensemble des phénomènes que je ne comprends pas.

L'interprétation de Comte consiste donc à voir dans le phénomène religieux l'expression d'un besoin de rationaliser le monde, de le comprendre et de l'expliquer.