Faire parler les produits
Jouir des signes
Consommer n’est pas seulement faire usage des choses mais également jouir des signes interposés entre les choses et nous.
Notamment les objets que nous possédons servent de marqueur social, ce qui nous permet de nous distinguer.
Les signes véhiculés par les objets prennent alors une importance décisive dans notre mode de consommation.
Ce sont eux qui prioritairement déclenchent l’acte d’achat
Cette analyse est particulièrement documentée par Baudrillard[1] dans son ouvrage La société de consommation.
Le design en ce sens deviendrait à proprement parlé un des signes en question, il serait donc objet de consommation.
Le designer : expert en signes
Le designer se spécialise alors dans les signes véhiculés par les objets, il détermine les signifiants et les arrangent pour que le consommateur parvienne à les décoder, à entendre ce qu'ils disent.
En tant que tel le designer est providentiel pour l'industrie, il suffit de le convertir aux besoins du marché.
Il ne s'agit pas de ré-humaniser les objets mais rendre désirable les produits. Ce supplément d’âme inséré dans les produits qu’attendent les industriels n’est pas la beauté mais les signes nécessaires pour faire naître le désir des consommateurs.
« La laideur se vend mal »
Lœwy[2] rend compte de cette dérive :
Pour qu’un produit se vende il faut non seulement une publicité et un marketing efficace mais aussi que l’apparence du produit lui-même renvoie au consommateur un certains nombre de signes déterminés en fonction de l’objet lui-même.
De fait, certains caractères sont reconnus comme des signes du luxe, de la beauté, de la qualité…
Les objets qui possèdent ces signes possèdent l’apparence à laquelle ces signes renvoient.
L’objectif est de donner l’impression de qualité ou de robustesse d’un produit, qu’il le soit réellement est très secondaire.
Le designer en tant qu’expert du signe devient celui à qui revient la tâche de donner l’illusion de certaines caractéristiques.
Pour cela il convient soit de masquer les signes intempestifs, soit d’ajouter les signes nécessaires.
Influencer les comportements
Dans la même optique
Steigler[3] note : « des techniques psychologiques sont développées pour nous faire adopter de nouveaux produits, parce que, a priori, nous n’en voulons pas »
ce qu’il appelle les techniques de l’adoption.
Autrement dit, il revient au designer d’inventer des combinaison de signes, essentiellement émotionnels, afin de manipuler psychologiquement le consommateur dans le but de le pousser à d’achat.
De nombreuses agences ou écoles de design ont résolument franchi le pas et ne cachent pas leur ambition.
Sur le site d’une agence parisienne on lisait par exemple : « Par le design nous créons, renforçons et pérennisons les liens intimes et affectifs qui unissent les Marques à leur public »
(pulp-design.com)